Bond Jamesbond de Hay reprendra la compétition avec Grégory Wathelet

Publié par Julien Counet le 10/01/2023

Après un repos bien mérité, Bond Jamesbond de Hay (Diamant de Sémilly x Kannan) reprendra la compétition au printemps sous la selle de Grégory Wathelet. Actuellement à la congélation, l’étalon Selle Français a pris ses marques ces dernières semaines avec le multi-médaillé belge. Une prise de connaissance en douceur avant de retrouver, on l’espère, les sommets de la compétition, cet été.

« Actuellement, c’est vraiment une remise en route. Le sentiment est très bon, Bond est un cheval très simple. C’est un grand cheval imposant sur lequel on se sent très bien. D’autant qu’il est très léger. C’est un cheval très souple et très réactif sur le saut. Il est extrêmement respectueux, ça ne fait aucun doute, il faudra maintenant qu’il fasse son chemin en trouvant ses marques pour qu’il puisse revenir à son niveau. Le plan est de profiter de mon séjour aux USA pour que sa semence soit congelée et ensuite qu’il soit prêt pour un retour à la compétition fin mars, début avril afin d’être prêt pour la haute saison de concours. Je ne force de toute façon jamais les choses lorsque je reçois un nouveau cheval. Il m’est déjà arrivé de partir directement au concours avec un nouveau cheval lorsque je le sens prêt mais je n’ai jamais couru après une échéance si je ne pensais pas que c’était idéal pour le cheval. Ici, le contexte est particulier car on est dans une période hivernale creuse et que je pars quelques semaines aux Etats-Unis. Du coup, nous avons retardé la mise en route d’un ou deux mois. Aujourd’hui, cela me fait deux Selles Français parmi mes chevaux de tête puisque Beau Gosse du Park (Quaprice Bois Margot) vient également de réintégrer les écuries. Lui aussi est encore en convalescence après sa hernie inguinale qui a impliqué sa castration. C’est un cheval dans lequel j’avais déjà beaucoup d’espérance en milieu d’année dernière. Il a rapidement performé lorsqu’il a intégré nos écuries. Malheureusement, il y a eu cet accroc-là qui lui a fait perdre six mois. On a évidemment toujours beaucoup d’espoir avec de tels chevaux et on sait aussi que l’été, il va y avoir beaucoup de grosses échéances. Nevados ne rajeunit pas et même si le plan tournera autour de lui, il ne fera pas de championnat l’an prochain! Maintenant avec la vente d’Iron Man et Cocktail, on voit que cela m’a obligé à annuler mes participations aux concours de Genève et Malines ! Cela montre que l’on n’a jamais suffisamment de chevaux de ce niveau. On travaille aujourd’hui avec de jeunes chevaux pour les amener ou des chevaux que l’on récupère comme ici et sur lesquels on peut compter. » explique Grégory Wathelet.

Pour son éleveur et propriétaire, Jean-Luc L’Helgouarc’h, c’est une décision importante pour la suite de la carrière de son protégé. Chirurgien de profession, c’est un véritable passionné qui découvre aujourd’hui l’univers du haut niveau à travers son étalon. « J’ai toujours été un cavalier passionné. Je monte toujours actuellement en épreuves amateurs mais un jour, j’ai décidé de me lancer dans l’élevage. J’ai demandé à Virginie Houard de sélectionner pour moi quelques poulinières car elle connaissait très bien les origines … et c’est comme cela que j’ai acheté il y a 13 ans Noya d’Orcival (Kannan Capitol II). Pour mon premier choix d’étalon, j’ai hésité entre Mylord Carthago et Diamant de Sémilly et j’ai finalement opté pour le second car la souche de Noya étant à forte connotation étrangère, j’ai préféré opter pour un véritable Selle Français … et c’est ainsi que Bond Jamesbond est né. C’est mon ami, Yves Berthollet ,co-propriètaire, qui a trouvé ce nom pour l’année des B. Je lui ai fait remarquer que c’était un nom qui claquait et qu’avec un tel nom, il fallait un cheval qui saute … et il saute !

Sincèrement, cela n’aurait été que moi, je l’aurais rapidement castré. Je trouvais que pour des amateurs comme nous, c’était trop difficile … mais pour mon ami, un cheval qui sautait aussi bien quand on l’a testé et qui était gentil, on devait le garder entier… J’ai accepté. Nous l’avons présenté à l’approbation des étalons SF à 3 ans. L’exercice d’obstacle est le même quelle que soit la taille du cheval. Ce qui à mon sens est une aberration et nous n’avons pas voulu le formater à cet exercice. Il ne n’a pas été approuvé, c’est comme çà. Tout jeune, James avait du talent. J’ai été moi-même interloqué par son charisme sur les paddock. Il est évident qu’il avait quelque chose de plus que les autres. Il était gentil, d’un très beau modèle et prometteur. Bien qu’il n’ait pas été agréé étalon à trois ans, nous avons décidé de le garder entier, car je me suis dit qu’il avait sa place en tant que reproducteur.

Bond jamesbond est le cheval prodige que tout éleveur rêve de faire naître un jour dans sa vie  mais ne pouvions imaginer de le voir évoluer à ce niveau de compétition. La génétique a son importance, mais elle ne fait pas tout. Fallait-il pouvoir mettre en avant ses qualités. La construction d’un cheval passe par les personnes qui l’entourent et les décisions qui sont prises à chaque étape. Nous avons eu la chance d’être le voisin de Bernard Briand Chevalier, un cavalier à l’écoute de ses chevaux et de rencontrer Jean Louis Roudaut, le coach de Bernard, véritable puits de science, une expertise parfaite du cheval, du cavalier et des étalons. »

C’est le début d’une grande histoire

« Bernard a monté James dès ses 4 ans, il n’a jamais brûlé les étapes. L’année des 5 ans, il a confirmé ses capacités. L’année de ses  6 ans, Bond a vraiment montré ce dont il était capable. Cette année-là, il a été enfin approuvé étalon admis sur performance au Selle Français lors de la finale jeunes chevaux à Fontainebleau. Personnellement, je l’aurais vendu à cette époque pour investir cet argent dans l’évolution de notre élevage. Mais finalement, nous avons décidé de le conserver. Pendant toutes ses années, Bernard travaillait avec Jean-Louis Roudaut sur la construction du cheval. Avec Jean Louis, Bernard, notre vétérinaire Benoit Cadin, nous échangions en permanence sur le cheval. Ils savaient mon implication et investissement dans l’avenir de James. Les décisions étaient prises ensemble.

Bernard, pas à pas, l’a amené vers le haut niveau en étant notamment 6ème du Grand Prix 3* de Dinard et 5ème de celui de Knokke. Nous étions alors convaincus de la qualité de James, de ses capacités d’accéder aux concours 5 étoiles. L’accès à ces concours, réservés à une élite de cavaliers, James avait déjà dix ans, le temps était compté. Ça a été un choix cornélien de décider que James quitte Bernard car si Bernard n’avait pas eu cette gestion du cheval c’est certain James ne serait pas arrivé à ce niveau. J’ai beaucoup de respect pour Bernard. Je ne le remercierai  jamais assez pour son investissement avec Bond.

Mon choix s’est porté sur Kevin Staut car j’ai toujours aimé son équitation. Jean louis avait un cheval chez lui, je me suis dit que c’était une suite logique. Il connaissait Bond parfaitement. Cela permettait aussi à Benoit Cadin, notre vétérinaire de continuer à suivre le cheval également, tout convergeait. C’est pourquoi, James a rejoint Kevin Staut avec qui il a pu démontrer qu’il avait sa place à ce haut niveau et très rapidement. Avec Kevin, Bond a continué à se classer à chaque concours comme il l’a toujours fait mais au final, nous n’avons pas trouvé les affinités que nous espérions.  

Lors du check-up après le concours de Dublin, où il s’est fait une légère blessure, nous avons décidé d’une vraie pause physique et mentale ayant bien concouru sur les plus belles pistes du monde. Nous l’avons confié, sous les conseils de Benoît notre vétérinaire, à Jennifer Bouyoux aux écuries de Fréhel dans son centre de Thalassothérapie pour une remise en forme. Durant cette pause, nous avons beaucoup réfléchi à sa carrière sportive aussi et celle de reproducteur. Cette réflexion nous a amené à vouloir le changer d’écurie. Pour répondre aux personnes qui nous reprochent que le cheval ait quitté la France. Je leur répondrais : « Quand vous êtes parents vous souhaitez le mieux pour vos enfants, et parfois pour eux vous choisissez une école adaptée à leur aptitude mais à l’étranger ». C’est ce que nous avons choisi pour notre cheval.

 C’est ainsi que j’ai pris contact avec Grégory Wathelet. C’est un cavalier dont j’ai toujours admiré l’équitation et qui a aussi l’avantage d’avoir monté de nombreux étalons dans sa carrière. En plus d’être un pilote, c’est un homme de cheval. C’est important pour moi qui suis très soucieux du bien-être animal. En fait, je souhaite que l’on soit avec mes chevaux comme je suis avec mes patients, à l’écoute. Tout doit se faire dans le respect de l’autre. Pour moi, c’est une chose primordiale. Les objectifs sportifs viendront d’eux-mêmes. Je n’aurai pas de frustration s’ils ne participent pas aux Jeux Olympiques … En fait, pour être sincère, ce n’est pas l’épreuve qui me fait fantasmer le plus.

Rien de cette histoire n’était prévu, nous avons refusé de très grosses offres et finalement, nous avons décidé de le garder. Le vendre c’est peut-être vendre notre âme. Je ne sais pas. Nous y sommes affectivement attachés. Mais avoir un cheval de ce niveau représente une charge mentale assez conséquente. Il faut aussi le vivre mais ce cheval nous donne avec toute humilité une autre dimension dans notre passion.Avec mon travail, étant de garde un week-end sur trois et vivant loin des aéroports, je n’ai pas souvent l’occasion d’aller le voir en vrai sur les terrains de concours. Mais je regarde toujours tous ses parcours plusieurs fois en vidéo.

Après avoir profité des bienfaits des bords de mer de Fréhel, nous retrouvons un James en super forme. Début décembre, il a rejoint les écuries de Grégory afin que chacun puisse prendre ses marques. Grégory étant en tournées aux États-Unis juste qu’à fin février, nous en profitons pour prélever sa semence. Il est de retour en Normandie au Haras de Tamerville chez Denis Brohier sous la selle d’Armand Mallet pour la congélation par Eurogen. Nous croyons beaucoup dans carrière de reproducteur car il possède une génétique hors du commun. Sa mère est une sœur utérine de pas moins de sept chevaux internationaux dont l’étalon Bornthis Way Chapelle (ISO 161) alors que leur grand-mère est une sœur utérine de trois internationaux dont deux ayant sauté au plus haut niveau parmi lesquels l’étalon ambassadeur du BWP, Ultimo van Ter Moude et Bow House Rubis sous la selle de William Whitaker.

Nous avons fait très peu de publicité autour de lui mais je pense qu’il a un grand avenir d’étalon devant lui. Les éleveurs qui ont un de ses poulains y reviennent. Un éleveur en a quatre, un autre en a trois, des éleveurs à l’affixe de renom lui ont fait confiance. Ses premiers poulains ont quatre ans cette année nous attendons avec impatience de le voir sur les circuits jeunes chevaux. Nous avons fait très peu de publicité autour de lui mais je pense qu’il a un grand avenir d’étalon devant lui. Je suis certain que les performances arriveront si le cheval se sent bien. Nous avons la chance d’avoir plusieurs sœurs et nièces de Bond qui me plaisent beaucoup mais qui sont encore très jeunes et avec lesquelles j’aurai de quoi bien occuper ma retraite prochainement.

En conclusion, je dois bien avouer que rien de toute cette aventure n’était prévu, nous avons appris, nous apprenons et nous avons beaucoup à apprendre mais au final c’est surtout du  bonheur.» nous glisse Jean-Luc L’Helgouarc’h