Né en 2012 à Sandweiler au Luxembourg chez le docteur vétérinaire Edmond Meyers, Mister Tac des Fusains (Non Stop x Toulon) a remporté ce dimanche son premier Grand Prix 5* sous la selle de Victor Bettendorf. Une première pour un cavalier Luxembourgeois avec un cheval né au Luxembourg bien que le BWP et désormais installé en Normandie comme ses propriétaires (ndlr: la famille Mégret du Haras de Clarbec).
Retour sur de quelques années en arrière sur les origines de l’histoire de Mr Tac avec son naisseur:
« L’histoire de Mister Tac est une belle histoire qui a commencé il y a très longtemps finalement. Dans les années 80, j’étais étudiant vétérinaire à Cureghem … avec Charles Bettendorf, le papa de Victor, qui était quelques années au-dessus de moi. Durant cette période, j’allais voir les expertises d’étalons du BWP à Oude Everlee à l’époque. Je trouvais que ce studbook regroupait de nombreux petits éleveurs qui n’avaient pas spécialement de grandes installations mais qui savaient aller chercher de très bonnes souches partout sans pour autant qu’elles ne soient déjà très connues et arrivaient à en faire quelque chose. Par la suite, une fois mon diplôme en poche, je suis rentré au Luxembourg et j’ai commencé à fréquenter les éleveurs luxembourgeois, j’ai dès lors décidé de les rejoindre en inscrivant mes poulains au studbook luxembourgeois. J’ai néanmoins toujours adhéré à la philosophie du BWP et finalement, j’ai décidé d’y réinscrire tous mes poulains !
La mère de Mister Tac a eu une histoire très particulière et tout a failli être bien différent. Tactique des Fusains est une fille de Toulon qui nous avons beaucoup utilisé à l’élevage et qui a véritablement modernisé celui-ci. La mère de Tactique était une jument hanovrienne d’un type assez ancien qui a évolué avec moi sur des épreuves d’1m20. Le croisement avec Toulon nous a donné de très bons produits, Victor a d’ailleurs également monté Tout Seul des Fusains, propre frère de Tactique, avec qui il a franchi 2m sur une épreuve de six barres. Malheureusement, Tactique s’est fracturé le fémur et son grasset était explosé. Normalement, avec une telle blessure, un cheval est condamné. Mais j’ai trouvé un chirurgien allemand qui l’a sauvée. Les premiers mois ont été difficiles mais elle avait une telle volonté de vivre qu’elle y est parvenue. Au final, c’est une qualité extrêmement importante et si Tactique a donné des poulains très différents qui ressemblaient fortement au père, elle a par contre transmis ce mental hors norme. Avant son accident, nous l’avions juste testée en liberté et elle nous avait montré à quel point elle était respectueuse. L’année après son accident, j’ai utilisé Lucky Loke R, un fils de Ramiro qui a évolué sous la selle de François Bossu et qui appartenait à Daniel Rinaldis qui m’a beaucoup aidé lorsque Tactique a eu son accident. J’ai ensuite utilisé Dutch Capitol qui était un étalon avec de gros moyens mais qui manquait de sang (même si son produit a plus de sang qu’on pourrait le penser). Ensuite en grand fan de Darco, j’ai décidé d’utiliser Ogano Sitte. Mais nous avons pris tellement de retard avec cette jument par manque de temps que j’ai finalement décidé de la conserver uniquement à l’élevage. J’ai ensuite décidé d’utiliser Non Stop et c’est ainsi qu’est né Mister Tac. J’avais choisi Non Stop qui était très âgé à l’époque car j’avais été impressionné de voir à quel point il était toujours en excellente forme malgré son âge, après avoir connu une belle carrière internationale où il avait évolué dans des épreuves exigeantes comme des derbys ou des épreuves de vitesses. Il a la réputation de faire des chevaux qui sautent à l’envers et c’est vrai que Amai avec Michael Whitaker, Ulyss avec Pius Schwizer ou encore Abbervail van het Dingeshof avec Denis Lynch avaient un style particulier … mais c’étaient des chevaux de top niveau. Je me suis dit que s’il y avait bien une jument avec laquelle je pouvais tenter, c’était Tactique car elle avait une technique remarquable en plus de son respect. Par la suite, j’ai encore voulu utiliser le sang de Darco avec Iron Man vd Padenborre mais la qualité des paillettes ne m’a pas permis d’avoir la jument pleine et j’ai décidé d’utiliser Poker de Mariposa qui m’avait beaucoup impressionné à l’expertise et j’ai aujourd’hui une jument de 4 ans.
Mister Tac est parti au débourrage chez Jean Michel Baryga à la frontière Française et je l’ai ensuite laissé tranquille durant son année de 4 ans. Mon fils l’a débuté à 5 ans avant qu’il ne fasse le cycle avec Peter Kuchar. Malheureusement, il n’a pas été qualifié pour la finale du championnat de Belgique pour un malheureux point de temps dépassé. Avec le recul, je pense que c’était une chance car il n’avait fait que 4 ou 5 parcours dans sa vie avant ce championnat alors je pense que nous pouvions être très content. Il est ensuite revenu chez nous et il a sauté une fois ou deux avec mon fils qui m’a dit que c’était vraiment le meilleur cheval qu’il avait monté. Victor Bettendorf l’a essayé … et l’a acheté. A 6 ans, j’avais comptabilisé que c’était le cheval de sa génération qui avait gagné le plus en CSI. Il a ensuite été vendu au Mexique avant de finalement revenir en France d’abord pour ses propriétaires mexicains avant d’être acquis par la famille Mégret. C’est là que l’on se rend compte de l’importance de trouver des gens qui s’investissent dans notre sport. Aujourd’hui, c’est encore plus émouvant de suivre les résultats car nous nous connaissons tous. C’est vraiment quelque chose d’unique. Il m’arrive régulièrement de m’arrêter sur un parking en étant en route pour regarder un parcours de Mister Tac sur Clipmyhorse. Je reçois également régulièrement des vidéos de Victor parfois tellement rapidement que je me demande s’il est déjà descendu de cheval. C’est très agréable et cela fait vraiment plaisir. J’avais prévu d’aller au concours de Genève mais mes parents n’étaient pas bien et j’ai finalement préféré rester près d’eux. J’avais ensuite pensé aller à ‘s Hertogenbosh mais finalement, je devais absolument suivre un cours de recyclage en tant que vétérinaire officiel pour la FEI en vue du CSI de Roeser à la mi-juin. Je suis finalement allé à Paris avec la famille Bettendorf. Je suis parti tôt dimanche matin pour rentrer à minuit mais ça valait le coup ! J’ai eu la chance de pouvoir aller aux écuries voir Mister Tac avant le Grand Prix mais une fois que le Grand Prix a débuté, je me suis installé en tribune à côté de Charles et j’ai profité du spectacle. Je n’ai pas voulu aller les voir au paddock. Je ne voulais pas leur mettre une quelconque pression supplémentaire. Cependant, dès qu’ils ont terminé leur barrage, j’ai sauté de mon siège pour aller féliciter Victor. Le Saut Hermes est vraiment un concours hors normes. Il y a beaucoup de beaux concours, mais ici, c’est une ambiance particulière en plein de centre de Paris, c’est magnifique. Je n’ai pas filmé ni quoi que ce soit, j’ai vraiment voulu profiter du moment ! C’est vraiment différent que de les suivre en vidéo.
Aujourd’hui, on voit vraiment le développement de l’ICSI et la prolifération de souches très en vue mais je pense que l’élevage restera disparate avec des chevaux à part qui seront toujours là car la gestion des chevaux reste un facteur important. Il est certain qu’on ne peut pas faire un crack hors d’un cheval qui ne passe pas une barre à terre mais l’inverse est tout à fait vrai aussi. Je pense que 80% de bons chevaux passent à côté d’une belle carrière à cause d’un mauvais management. A la maison, j’ai adopté beaucoup de points de la vision très naturelle de Victor. Je pense qu’il ne faut pas être fanatique mais adapté au cas par cas. » nous explique Edmond Meyers ravi de sa visite parisienne.